Le quotidien du médecin – 9 janvier 2014

Les adjuvants aluminiques en débat à l’Académie de Médecine

Comment communiquer sur les risques des adjuvants aluminiques sans que cela porte atteinte à l’image de la vaccination? C’est la question que se posent désormais les Académiciens après la présentation du chercheur Romain Ghérardi.

PRÉSENT DANS LES VACCINS depuis 1927, les adjuvants aluminiques sont de plus en plus montrés du doigts dans les publications scientifiques. C’est ce qu’est venu démontrer Romain Ghérardi, aux membres de l’Académie nationale de Médecine auxquels il a présenté mardi les derniers résultats sur le risque de myofasciite à macrophage (MFM) causée par l’oxyhydroxide d’aluminium à l’occasion de la séance de rentrée de l’Académie. Dans un contexte mondial d’accroissement progressif de la couverture vaccinale, le directeur de recherche de l’unité Inserm U955 et médecin au Centre de référence neuromusculaire Garches Necker Mondor Hendaye (GNMH) craint que la population soit exposée à des quantités croissantes d’aluminium aux propriétés neurotoxiques connues, bien que les doses impliquées dans les vaccins soient inférieures à celles ingérées quotidiennement dans notre alimentation.

Les Académiciens ont manifesté un vif intérêt pour cette problématique et ont émis des craintes sur la manière dont cette réflexion doit être présentée au public. Le Dr Roger Nordmann a ainsi rappelé qu’il ne fallait « surtout pas que le risque lié aux adjuvants fasse oublier le risque lié à une absence de vaccination ». Jean-Louis Montastruc, s’est pour sa part interrogé : « voici une présentation qui fait réfléchir à la façon dont l’Académie peut communiquer sur ce sujet sensible. Est-ce que l’on arrivera à faire la part entre ce qui relève de la survaccination et ce qui relève de la vaccination nécessaire »?

Romain Ghérardi n’est ni anti-vaccin ni même anti-adjuvant, mais milite pour qu’une réflexion soit engagée sur le retrait progressif des sels d’aluminium des vaccins humains, et leur remplacement par le phosphate de calcium, un vieil adjuvant qui a l’avantage d’être physiologique. L’intérêt de ce passage à des adjuvants plus facilement éliminables serait en outre confirmé par les résultats parus en mars 2012 dans le journal de l’association américaine de biologie expérimentale Phaseb J. Sharon Hutchison et ses collègues de l’université de Glasgow avaient démontré chez la souris qu’il suffisait de deux heures aux lymphocytes B et T pour acquérir les antigènes introduits par un vaccin contenant un adjuvant aluminique.

Le macrophage, « cheval de Troyes » des sels d’aluminium

« Le modèle qui voulait que l’oxyhydroxyde d’aluminium soit éliminé en quelques semaines dans les urines est maintenant complètement dépassé » estime Romain Ghérardi. Depuis quelques années, on sait en effet que les sels d’aluminiums ne sont pas solubilisés dans le milieu extracellulaire jusqu’à leur élimination mais sont captés par des macrophages qui ne parviennent pas à les éliminer et qui jouent alors le rôle de « cheval de Troyes » en les véhiculant vers des organes éloignés et notamment vers le cerveau en passant par le canal thoracique.

« Dans les tout derniers papiers, on a compris que l’oxyhydroxyde d’aluminium est un toxique pour les phagolysosomes des macrophages. Il détruit leurs membranes et se retrouve dans le cytosol » explique Romain Ghérardi. C’est cette capacité qui lui confère une telle persistance dans l’organisme. Si cette présence prolongée, parfois jusqu’à 12 ans, est généralement bien tolérée, des critères individuels peuvent augmenter le risque de MFM. Les critères identifiés et étudiés par le centre de référence GNMH sont l’âge, le risque est plus important à partir de 50 ans et le début de l’immunosenescence, et des variants des gènes précurseurs de la production la chimiokine MCP-1. Cette dernière a pour fonction de favoriser le passage des macrophages d’un tissus à l’autre. L’oxyhydroxyde d’aluminium est moins éliminé et circule plus facilement chez les patients qui expriment plus de MCP-1, et cela d’autant plus que l’aluminium est lui même un important promoteur des récepteurs au MCP-1.

« Sur 250 patients, on a observé une plus grande fréquence de certains variants qui augmentent la quantité de MCP-1 circulant » explique Romain Gherardi. « Cela ne peut pas être considéré comme un marqueur prédicteur. On a contrôlé quatre variants, il y en a encore des centaines ». L’étude de l’impact des facteurs de risques individuels de MFM fait également partie des recommandations que le chercheur a défendues devant les Académiciens.

Plus de 1000 patients MFM identifiés en France

Selon l’association de malades E3M, plus de 1.000 patients avec une MFM avérée ont été identifiés en France mais en l’absence de registre dédié le chiffre exact de patients est inconnu. Parmi les 353 patients examinés entre 1994 et 2002 dans le centre de référence neuromusculaire GNMH, 70% étaient des femmes, l’âge médian était de 45 ans et le nombre moyen d’injection de vaccin contenant de l’aluminium dix ans avant la détection était de 5,3. Les principaux symptômes rapportés étaient des myalgies diffuses chroniques, une fatigue diffuse chronique, une altération manifeste de la mémoire et de l’attention et une dyspnée.

http://www.lequotidiendumedecin.fr/print/168400 09/01/2014

› DAMIEN COULOMB

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